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Apocrypha :Tobit, Judith, Susanna

Apocryphes : Tobit, Judith et Suzanne De Dieu ou des Hommes ?
Les Apocryphes  désignent aujourd’hui les écrits additionnels qui furent ajoutés au canon de la Bible par l’Église catholique romaine au concile de Trente (1546). Les écrivains catholiques qualifient ces livres de deutérocanoniques AA55, ce qui signifie “ du second canon ” ou “ canon postérieur ”, les distinguant ainsi des livres protocanoniques. Mais quelle est leur véritable auteur : Dieu ou des Hommes ? Trois de ces récits, Tobit, Judith et Suzanne sont illustrés par des œuvres du Musée. Parcours dans ces salles, et dans les textes, pour essayer de trouver la réponse.
Le Livre de Tobie fut composé en araméen vers le IIè siècle av. n.è.  Considéré par les catholiques comme un livre historique, il se trouve après Esther et Judith, tandis que des manuscrits de la tradition grecque de la Bible (Vaticanus, Alexandrinus) le classe comme un livre de Sagesse. Tobit fait l’éloge de la piété familiale, du mariage et de la charité. Il se déroule sur près de quatre siècles, du schisme entre les royaumes d’Israël et de Juda en 931 av.n.è jusqu’à la chute de Ninive en 614 av.n.è.
Le jeune Tobie, aidé de l'archange Raphaël, rend la vue à son vieux père Tobit   inv 1335 Jan SANDERS van HEMESSEN
Hemiksen (près d'Anvers),
vers 1500 Richelieu 2ème étage Pays-Bas salle 11
Derrière Tobit, Anne, son épouse, et plus à gauche, Sarah, la femme de Tobie. Magnifique exemple d'une vigoureuse et originale peinture d'histoire, mi-réaliste, mi-héroïque, qui rend si attachante la manière expressivement sculpturale et déclamatoire de Hemessen, au-delà même des italianismes de la Renaissance.
Ce livre raconte  l’histoire d’un Juif pieux de la tribu de Naphtali qui est déporté à Ninive et qui devient aveugle après avoir reçu de la fiente d’oiseau dans les yeux. Il envoie son fils, Tobie, en Médie, pour recouvrer de l’argent qui lui était dû ; Tobie, conduit à Ecbatane par l’archange Raphaël qui se fait passer pour un homme, fait l’acquisition du cœur, du foie et du fiel d’un poisson. Il rencontre une veuve qui est demeurée vierge bien qu’elle ait eu sept maris, car chacun d’eux a été tué la nuit des noces par Asmodée, un esprit méchant. Sur le conseil de l’ange, Tobie épouse la vierge veuve ; en brûlant le cœur et le foie du poisson, il éloigne le démon. Quand il rentre chez lui, il rend la vue à son père grâce au fiel du poisson.

  Ce conte est pure fiction.
Outre sa nature imaginaire et les emprunts qu’il fait à la superstition, il contient des erreurs.

Le Livre de Tobie fut composé en araméen vers le IIè siècle avant n.è.

Archange Raphaël quittant la famille de Tobie   inv 1736  
REMBRANDT Harmensz. van Rijn    Amsterdam, 1669
Richelieu  2ème étage   Salle 31  
Une des plus belles affirmations du style baroque dans
l'œuvre de Rembrandt.
Réalisé par Rembrandt dans le contexte de la Nouvelle Jérusalem à Amsterdam, ce tableau souligne la connaissance et le goût du peintre pour les textes bibliques. Le pieux Tobit déporté à Ninive, aveugle, demande à mourir.  Le peintre a choisi de représenter l’épilogue de cette histoire. Il n’a pas oublié le chien qui suit son maître partout…
Ce conte est pure fiction. Outre sa nature imaginaire et les emprunts qu’il fait à la superstition, il contient des erreurs. Par exemple, le récit dit que Tobit a été témoin de la révolte des tribus du nord et de la déportation des Israélites à Ninive. Or, 257 ans séparent ces deux événements de l’histoire d’Israël. Pourtant, le récit précise que Tobit avait 112 ans au moment de sa mort. — Tobie 1:4, 11; 14:1

Le livre de Tobie

contient aussi de surprenants

épisodes de sorcellerie.  

Ce livre contient aussi de surprenants épisodes de sorcellerie (Tobie 6:5-9; 8:2-3; 11:8-15). Si le Talmud et le Coran font place à la superstition et à la peur, la Bible se distingue singulièrement des écrits des autres peuples de l’Antiquité par le fait que, chaque fois qu’elle parle des pouvoirs surnaturels et des arts magiques, c’est pour les condamner.
Le livre de Judith relate comment la belle et encore jeune veuve Judith écarte la menace d’une invasion assyrienne en décapitant le général ennemi Holopherne, et restaure du même coup la foi en la puissance salvatrice de son Dieu. Il contient cependant des incohérences historiques et géographiques. Ce roman pieux et patriotique est donc généralement considéré lui aussi comme une pure fiction.
Judith brandissant la tête d'Holopherne qu'elle vient de décapiter RF 2123 Jan MASSYS, fils de Quentin Massys
Anvers, vers 1543 
Impeccable faire lisse et froid typique du fils de Massys
qui se pose
en rival
des Italiens.
Assiette : Judith et Holopherne   R 274
Pierre REYMONDRichelieu 1er étage salle 20 vit 4
Le terme « canon » désigne le catalogue des livres manifestement inspirés de Dieu. On compte 66 livres qui
sont communément acceptés comme canoniques et font   dès lors partie intégrante de la Bible.
Qui a établi le canon ?  
On a prétendu que le canon (et notamment celui du NT) a été établi alors que l’Eglise détenait la puissance temporelle. Il serait plus exact de dire qu’elle a entériné la liste des livres que les chrétiens avaient toujours admis comme l’incontestable Parole de Dieu. AA53 L’un des dons miraculeux accordé à la congrégation primitive était le « discernement des paroles inspirées » (1 Corinthiens 12 :4,10). Cette capacité surnaturelle de faire la différence entre des paroles inspirées de Dieu ou non a permis de fixer très tôt le canon biblique. Pour Oskar Sharsaune, professeur d’histoire de l’Eglise, « C’est l’Eglise des martyrs, et non l’Eglise des puissants, qui nous a légué le Nouveau Testament ». AA54
« Or il y a diversité de dons […] La manifestation de l’esprit est donnée à chacun à des fins utiles. Par exemple à l’un est donné grâce à l'esprit une parole de sagesse […] à un autre le discernement des paroles inspirées » 1 Corinthiens 12:4,10
C’est l’Eglise des martyrs, et non l’Eglise des puissants, qui nous a légué le Nouveau Testament.  
Le récit de Suzanne et les vieillards constitue le 13ème chapitre apocryphe du livre de Daniel dans la Vulgate. Suzanne, surprise alors qu’elle prend son bain, refuse les avances de deux vieillards, qui l’accusent alors d’adultère et la font condamner à mort. Survient le jeune prophète Daniel qui dévoile le complot. Les vieillards meurent, Suzanne est épargnée, et Daniel devient célèbre. Si cela était réellement arrivé, pourquoi le récit apparaît-il en grec - comme les deux autres additions – alors que le livre fut lui-même écrit en hébreu et en araméen ?
L'Innocence de Suzanne reconnue  inv 8245 Valentin de BOULOGNE, dit LE VALENTIN
Coulommiers (Seine-et-Marne),

Vers 1625
Richelieu 2ème étage Les Caravagesques français   salle 11
Suzanne et les vieillards     RF 1983-67 Giambattista PITTONI
Venise, 1687
Denon 1er étage  Salle 24 La chaste Suzanne est surprise au bain par deux vieillards dont elle repousse les avances ; l'un d'eux lui offre une bourse et des pièces brillent dans sa main droite. Peut-être une esquisse pour un grand tableau non exécuté ou disparu.
Le monde de l’époque de Paul regorgeait de telles histoires. L’apôtre recommande d’ailleurs aux chrétiens « de ne pas faire attention à des fables » (1 Timothée 1:4). Ou encore : « Ces fables (profanes, Jérusalem) qui attentent à ce qui est saint et qui sont des racontars de vieilles femmes, refuse-les. » (1 Timothée 4:7).  Et à Tite, il écrit que les chrétiens fidèles ne devraient pas “ prêter attention à des fables juives ni à des commandements d’hommes qui se détournent de la vérité AA56 » (Tite 1:14). Le terme utilisé vient du mot grec muthos ('mythe') qui désigne “ une histoire (religieuse) qui n’a rien à voir avec la réalité ”. AA57 Ces récits apocryphes n’ont donc rien à voir avec « la norme des saines paroles » (Jérusalem) et ne constitue pas un modèle de paroles salutaires. – 2 Timothée 1:13